LE CHERCHEUR DU MOIS

« Le chercheur du mois » est une tribune que le Réseau Africain d’Analyse du Discours (R2AD) met à la disposition de ses membres. Cette rubrique fait la promotion des acteurs, chercheurs, enseignants-chercheurs et doctorants menant des recherches dans le domaine de l’Analyse du Discours en/sur l’Afrique. « LE CHERCHEUR DU MOIS » est la plateforme de valorisation et de promotion de leurs recherches, de leurs productions et de leurs parcours.

Pour ce numéro, nous recevons M. Moussa Coulibaly, Enseignant-chercheur, Maître-assistant, spécialiste de Stylistique et d’Analyse du Discours à l’Université Assane SECK de Ziguinchor, au Sénégal. Entretien.

𝓡2𝓐𝓓’𝓒𝓸𝓶 : Bonjour Dr, présentez-vous s’il vous plaît. Votre biographie en quelques lignes ?

𝐌. 𝐌𝐨𝐮𝐬𝐬𝐚 𝐂𝐨𝐮𝐥𝐢𝐛𝐚𝐥𝐲 :

Bonjour cher collègue. Ravi de m’entretenir avec vous. Après mon passage au lycée Ahoune Sané de Bignona d’octobre 2009 à juin 2019 comme professeur de français, j’ai été recruté en 2019 comme enseignant-chercheur en Sciences du langage à l’Université Assane Seck de Ziguinchor, Sénégal. Je suis diplômé de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, car j’y ai fait mon cursus universitaire et j’y ai soutenu, en février 2015, une thèse de doctorat unique sur la poésie de la génération sénégalaise post-négritude sous la direction des professeurs Papa Alioune NDAO et Amadou LY ; maitres à qui je rends hommage à travers ces lignes. Ce diplôme m’a, d’ailleurs, permis d’intégrer l’équipe pédagogique du département de Lettres modernes de l’Université Assane Seck en tant que vacataire. Mon premier grade CAMES, celui de maitre-assistant, je l’ai obtenu en 2022. J’exerce jusqu’à ce jour à l’Université Assane Seck et j’y suis responsable des enseignements comme la grammaire moderne, l’analyse du discours, la pragmatique, la stylistique. 

𝓡2𝓐𝓓’𝓒𝓸𝓶 : Dans le cadre de sa tribune d’actions promotionnelles des valeurs et compétences du R2AD, vous avez été désigné « chercheur du mois », quel est votre sentiment ?

𝐌. 𝐌𝐨𝐮𝐬𝐬𝐚 𝐂𝐨𝐮𝐥𝐢𝐛𝐚𝐥𝐲 :

La rubrique « chercheur du mois » est une tribune très pertinente et opportune pour faire connaitre les chercheurs invités. Je me réjouis de votre choix sur ma modeste personne comme invité et je vous en suis très reconnaissant. Bref, c’est un sentiment de satisfaction qui m’anime. Je profite aussi de l’occasion pour rendre un vibrant hommage au R2AD et à tous ses membres partout.

𝓡2𝓐𝓓’𝓒𝓸𝓶 : Décrivez-nous votre parcours et parlez-nous de votre implication au sein du Réseau Africain d’Analyse du Discours (R2AD).

𝐌. 𝐌𝐨𝐮𝐬𝐬𝐚 𝐂𝐨𝐮𝐥𝐢𝐛𝐚𝐥𝐲 :

Un parcours semblable à beaucoup d’autres parcours parlant des enseignants naturellement. Titulaire de la maitrise en Lettres modernes à l’époque (équivalent de Master aujourd’hui), j’avais déjà commencé à enseigner à Dakar dans certaines écoles. Ces premiers pas dans l’enseignement m’ont poussé à me présenter à la Faculté des Sciences et Technologie de l’Education et de la Formation (FASTEF, ex. Ecole normale supérieure  de Dakar) d’où je suis sorti avec un Certificat d’Aptitude à l’Enseignement Secondaire (CAES). Pour anecdote, le Vice-Président du R2AD était membre du jury de mon jury de recrutement comme élève-professeur en l’occurrence le Pr Kalidou Sy de l’UGB de Saint-Louis, sommité intellectuelle à qui je fais le « salve magister ». Le diplôme CAES a permis mon affectation au Sud du Sénégal à Bignona en octobre 2019 où j’ai officié presque pendant dix ans au lycée. Avec le diplôme de doctorat et pour nécessité de service, le département de Lettres modernes de l’Université Assane Seck m’a chargé des enseignements avant que je ne sois recruté officiellement en 2019.

Pour mon implication au sein du Réseau Africain d’Analyse du Discours (R2AD), après la mise en place du bureau à Abidjan en juin 2021, j’ai été désigné comme membre de la Cellule cogito afin de réfléchir sur les actes des Journées d’études et de lancement avec trois supports identifiés à savoir l’ouvrage Mélanges offerts au Pr Momar Cissé, la Revue GRADIS, la Revue ATRALANG. Il y aussi des projets de publication, d’élaboration d’un dictionnaire du discours politique en contexte africain. Toujours dans mon implication au niveau du R2AD, nous avons travaillé au niveau de la Cellule Cogito sur les fondements du prix de la meilleure thèse qui sera concrétisé lors du congrès de Saint-Louis du Sénégal en 2023. Bref, il y a énormément de choses déjà faites mais ça reste encore. Pour finir sur la Cellule Cogito, je rends hommage à l’ainé avec qui je travaille dans cette instance en l’occurrence le Pr Nanourougo Coulibaly de l’UFHB d’Abidjan, collègue dont les vues, très pointues sur certaines questions académiques, ont été d’une utilité singulière. Je voudrais saisir l’occasion également pour saluer la synergie des intelligences qui a guidé les maitres ivoiriens, sénégalais, béninois, etc. pour avoir pensé à mettre sur pied le R2AD, un véritable creuset fécond pour les échanges scientifiques, une force humaine pour travailler sur les discours en contexte africain. Ces maitres, de si grand prestige, méritent toutes nos considérations, tous nos respects ; leurs image et sacrifices nous poussent au dépassement de soi pour maintenir haut la flamme déjà allumée.

𝓡2𝓐𝓓’𝓒𝓸𝓶 : Quel regard portez-vous sur la recherche en Afrique de façon générale et plus spécifiquement sur le domaine de l’Analyse du Discours ?

𝐌. 𝐌𝐨𝐮𝐬𝐬𝐚 𝐂𝐨𝐮𝐥𝐢𝐛𝐚𝐥𝐲 :

Comparée aux autres époques, je pense que la recherche en Afrique se porte mieux surtout avec la génération actuelle qui a eu la chance d’être encadrée, suivie, etc. par des maitres rompus à la tâche, des ainés généreux, etc. qui font tout pour faire avancer la science comme c’est bien le cas avec le R2AD. En tant que réseau, cette instance a permis de fédérer les pensées, les compétences mais aussi les spécialités en Sciences du langage afin de décloisonner, de vulgariser les recherches sur une grande partie de l’espace africain ; ce qui d’ailleurs est un grand avantage pour la jeunesse d’aujourd’hui. Quant à l’Analyse du discours spécifiquement, je pense que l’honneur revient surtout aux membres fondateurs du R2AD pour avoir pensé à une telle initiative. L’Analyse du discours y retrouve alors en bonne place et les thématiques soulevées lors des journées d’études et de lancement en juin 2021 à Abidjan montrent à suffisance que les chercheurs africains surtout les jeunes se sont appropriés la discipline afin de relever les défis surtout pour le cas du continent africain. Les travaux réalisés sous l’égide de la présidente Profe Lezou-Koffi sur la cartographie de l’Analyse du discours, en attendant qu’ils soient publiés, révèlent un réel engouement envers la discipline ; ce qui, du reste, est très encourageant. Avec les rencontres scientifiques, nous parviendrons à relever les défis et je crois que le congrès de Saint-Louis du Sénégal pour juin 2023 sera une autre occasion pour évaluer ce qui a déjà été fait mais aussi il devrait être question de nouvelles perspectives toujours pour l’Analyse du discours en Afrique. Aujourd’hui, il est heureux de constater que les chercheurs surtout africains s’intéressent à l’Analyse du discours pour son édification mais aussi pour son implantation réelle sur le continent africain dans le souci d’aborder des  questions touchant directement cette Afrique. Voilà pourquoi des travaux dans des domaines tels que la littérature, la politique, la presse tout comme les cultures urbaines ont été produits ; travaux qui confirment le dynamisme de cette discipline.

𝓡2𝓐𝓓’𝓒𝓸𝓶 : Comment avez-vous rencontré l’Analyse du Discours ?

𝐌. 𝐌𝐨𝐮𝐬𝐬𝐚 𝐂𝐨𝐮𝐥𝐢𝐛𝐚𝐥𝐲 :

J’ai « rencontré » l’Analyse du discours par le biais d’un camarade de Fac. qui revenait fraichement de l’Europe et plus précisément de la France après avoir quitté la Licence du département de Lettres modernes de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de l’UCAD. Après deux années d’étude en France sanctionnées par le diplôme de maitrise, ce camarade et ami était revenu faire le Diplôme d’Etudes Approfondies (DEA) avec nous à Dakar et avait travaillé sur la Déclaration de Politique Générale (DPG) d’un célèbre premier ministre du Sénégal aux talents oratoires incontestés et incontestables. C’est lors de la présentation des documents personnels en termes d’exposés que nous avions tous découvert l’approche proposée par ce camarade. Depuis, nous nous avions déjà compris qu’il y avait quelque chose qui manquait à notre formation et nous attendions juste l’occasion pour combler ce vide, eh bien chacun à sa manière. Comme j’avais déjà fait le choix de travailler sur la poésie post-négritude avec l’exemple de la jeune génération depuis la maitrise, je m’étais fixé l’objectif de finir la thèse et ensuite me lancer dans l’Analyse du discours. C’est bien ce que j’ai fait et le R2AD est venu faciliter le reste après mes premiers pas dans l’argumentation, la pragmatique, l’énonciation ; car nous avions à l’époque reçu des enseignements sur ces branches des Sciences du langage. Aujourd’hui, je m’intéresse donc à l’Analyse du discours avec des corpus sur la littérature, sur les cultures urbaines comme le rap et le slam mais aussi sur la presse, etc. A l’heure actuelle, je suis chargé des enseignements en analyse du discours. Le voyage de certains membres fondateurs du R2AD à Assane Seck à Ziguinchor à la date du 25 juin 2022 a permis de partager avec et les collègues et les étudiants pendant toute une journée sur nombre de vues.

𝓡2𝓐𝓓’𝓒𝓸𝓶 : A votre avis, quel est la place et le rôle du chercheur africain aujourd’hui dans le monde ?

𝐌. 𝐌𝐨𝐮𝐬𝐬𝐚 𝐂𝐨𝐮𝐥𝐢𝐛𝐚𝐥𝐲 :

Question difficile à répondre mais je vais tout de même tenter. Je pense que le chercheur, qu’il soit africain ou autre, a été formé dans / pour une spécialité bien précise ; spécialité qu’il est censée maitriser afin d’y faire des recherches. Et dès lors que vous parlez de « chercheur africain », je me dis automatiquement qu’il devrait mettre l’Afrique au cœur de ses préoccupations de recherche sans pour autant rejeter des études sur d’autres aires du monde si l’occasion se présentait à lui. Pour terminer sur ce point, j’ai envie de reprendre les propos de quelques-uns de nos maitres de Dakar qui nous rappelaient que si nous, Africains, n’acceptons ou ne nous mobilisons pas pour travailler sur l’Afrique, qui d’autre viendra le faire ? Donc l’Afrique doit être cette boussole qui guide nos pas dans les recherches et le R2AD n’a pas manqué de le rappeler en posant ces jalons comme l’attestent les thématiques de la rencontre d’Abidjan en 2021 qui mentionnait « L’Analyse du discours en Afrique francophone : Etat des lieux-Objets-Enjeux-Perspectives » et du Congrès de Saint-Louis en 2023 qui invite à réfléchir sur « L’analyse du discours en contexte africain : une analyse du discours située ». Ces thèmes nous renseignent sur les orientations du R2AD qui cherche à mettre en avant le continent africain.   

𝓡2𝓐𝓓’𝓒𝓸𝓶 : Quelles sont vos lectures du moment ? Avez-vous un coup de cœur à partager avec nous ?

𝐌. 𝐌𝐨𝐮𝐬𝐬𝐚 𝐂𝐨𝐮𝐥𝐢𝐛𝐚𝐥𝐲 :

Je lis tout ce qui me tombe dans les bras mais j’ai une préférence pour les livres qui traitent  des questions politiques compte tenu de la situation très bouillonnante de nos pays africains surtout ceux de l’Ouest africain. Mon deuxième champ de lecture est naturellement les livres sur les cultures urbaines, car elles ont fini par rythmer la vie de tous les jours de la jeunesse. Pour le « coup de cœur », je n’en ai pas vraiment.

𝓡2𝓐𝓓’𝓒𝓸𝓶 : Votre mot de fin ?

𝐌. 𝐌𝐨𝐮𝐬𝐬𝐚 𝐂𝐨𝐮𝐥𝐢𝐛𝐚𝐥𝐲 :

Je voudrais remercier du fond du cœur le comité chargé de la désignation du « chercheur du mois » pour avoir choisi ma modeste personne. Mes remerciements et encouragements vont aussi à l’endroit de la cellule de communication qui est en train d’abattre un excellent travail pour rendre visible les collègues et leurs productions scientifiques. Je saisis cette occasion pour remercier tous les concitoyens sénégalais au sein du R2AD mais aussi je rends un vibrant hommage à tous les autres collègues des autres pays membres du réseau. Merci aussi aux membres de la Cellule Cogito ; cellule dans laquelle j’évolue. Merci aussi aux membres fondateurs du R2AD d’ici et d’ailleurs pour avoir mis sur pied ce joyau pour la jeune génération et mention spéciale à la Présidente Lézou-Koffi de l’UFHB d’Abidjan, au Vice-président Kalidou Sy de l’UGB de Saint-Louis, à la Profe Marie-Anne Paveau de l’Université Paris XIII, France. Ces professeurs ont honoré l’UFR des Lettres, Arts et Sciences Humaines (LASHu) et l’Université Assane Seck de Ziguinchor pour avoir accepté de venir partager avec nous leurs expériences durant le mois de juin 2022 malgré les conditions de voyage très difficiles et un agenda très chargé. Je voudrais terminer en souhaitant la bienvenue à tous les congressistes sur les terres africaines du Sénégal pour le Congrès du R2AD prévu au mois de juin 2023 à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis du Sénégal. Bonne arrivée à toutes et à tous et bon séjour parmi nous.

Vive le R2AD ! Vive l’Afrique !

                              Merci Docteur                                                                               

                             CELCOM R2AD